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Une recherche pourrait prévenir des caillots de sang potentiellement mortels chez les personnes atteintes du cancer

Un essai clinique mené par L’Hôpital d’Ottawa change la cancérologie à l’échelle mondiale

le 20 février 2019

Harold Black (au milieu) a eu un caillot de sang potentiellement mortel après avoir reçu un diagnostic de cancer. Il a survécu au caillot. Aujourd’hui, les personnes atteintes du cancer comme M. Black risquent beaucoup moins qu’avant d’avoir de tels caillots grâce à la recherche dirigée par le Dr Philip Wells (à gauche) et le DMarc Carrier (à droite).

Membre actif d’une chorale d’église, Harold Black avait l’habitude de rester debout et de chanter pendant de longues périodes. En septembre 2018, toutefois, il a eu de la difficulté à reprendre son souffle pendant une prestation. Il est allé à l’Urgence de L’Hôpital d’Ottawa deux jours plus tard, où on lui a annoncé qu’il était atteint d’une embolie pulmonaire. La cause? Un caillot de sang potentiellement mortel dans un poumon.

« C’était une expérience terrifiante, mais je m’estime très chanceux parce qu’on m’a dit que le premier symptôme d’une embolie pulmonaire est souvent la mort », affirme M. Black, qui a 76 ans.

Il a reçu un traitement intensif sous étroite surveillance pendant deux jours à L’Hôpital d’Ottawa. Le caillot est parti, mais M. Black s’administre encore une injection quotidienne de médicaments pour prévenir la formation d’autres caillots.

Un caillot de sang peut se former chez quiconque, mais il est particulièrement courant chez les personnes atteintes du cancer. En fait, il arrive au deuxième rang de leurs causes de décès, à égalité avec les infections.

« Le cancer à lui seul peut accroître le risque de caillots de sang. La chimiothérapie, la chirurgie et d’autres facteurs peuvent par la suite le faire augmenter encore davantage », explique le Dr Marc Carrier, qui a traité M. Black à l’Hôpital.

Ce problème a incité le DCarrier et le Dr Philip Wells, un collègue spécialisé dans ce domaine, à concevoir un essai clinique pour déterminer si une faible dose d’anticoagulant pourrait prévenir les caillots de sang chez les personnes venant de recevoir un diagnostic de cancer. Les résultats de l’essai, récemment publiés dans le New England Journal of Medicine, changent maintenant la pratique partout dans le monde.

L’essai portait sur 563 personnes venant de recevoir un diagnostic de cancer qui courraient un risque élevé d’avoir des caillots de sang (d’après des analyses de sang et d’autres facteurs cliniques). La moitié d’entre elles a pris un anticoagulant deux fois par jour. L’autre moitié a pris un placebo. Les personnes ayant pris un placebo étaient plus de deux fois plus susceptibles d’avoir des caillots de sang par comparaison à celles ayant pris l’anticoagulant (10,2 % contre 4,2 %).

« Les professionnels de la santé prescrivent couramment des anticoagulants pour prévenir la formation de caillots sanguins chez les personnes qui courent un risque élevé d’en avoir. Or, ce n’était pas la pratique auprès des personnes atteintes du cancer, car on les croyait trop susceptibles aux hémorragies», ajoute le DCarrier, qui est aussi scientifique principal à L’Hôpital d’Ottawa et professeur agrégé à l’Université d’Ottawa. « Notre essai montre que si on administre par voie orale une dose relativement faible d’anticoagulants aux bons patients, les avantages surpassent facilement les risques. »

Environ 1,9 million de personnes reçoivent un diagnostic de cancer chaque année au Canada et aux États-Unis. Les chercheurs estiment qu’environ la moitié d’entre elles, soit 950 000 personnes, pourrait tirer parti de la stratégie de prévention des caillots de sang mise à l’essai. Elle permettrait de prévenir les caillots chez 6 % d’entre elles, soit 57 000 personnes.

« Les caillots de sang peuvent non seulement entraîner la mort, mais aussi provoquer de la douleur et réduire la qualité de vie, en plus d’être dispendieux à traiter », précise le DWells, qui est aussi scientifique principal et chef de la Médecine à L’Hôpital d’Ottawa et à l’Université d’Ottawa. « Nous nous attendons à ce que cet essai change la pratique et aide bien des personnes atteintes du cancer à éviter les caillots de sang. »

M. Black poursuit son traitement contre le cancer et participe de nouveau à sa chorale.

« Si ces recherches peuvent empêcher la formation de caillots de sang chez les patients comme moi, cela représentera un progrès important pour beaucoup de gens », poursuit-il.

Le Programme de thrombose (traitement et prévention des caillots de sang) de L’Hôpital d’Ottawa et de l’Université d’Ottawa est celui le plus vaste et le plus axé sur la recherche au monde. Les chercheurs du Programme ont publié quatre articles dans le New England Journal of Medicine depuis 2015. Leurs recherches transforment des vies à Ottawa et partout dans le monde.

« Je remercie les excellents médecins, infirmières, coordonnateurs de recherche et autres membres de l’équipe du programme de thrombose, précise le Dr Wells. Je remercie surtout les patients qui participent à nos recherches et nous aident ainsi à améliorer les soins pour tout le monde. »

L’essai était financé par l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa et les Instituts de recherche en santé du Canada (principal subventionnaire). L’Alliance BMS-Pfizer a aussi fourni des fonds, mais n’a joué aucun rôle dans la conception de l’essai ni l’analyse des résultats. L’essai a aussi reçu le soutien du réseau de recherche CanVECTOR et du Centre de méthodologie d’Ottawa. Il est possible de réaliser de telles recherches à L’Hôpital d’Ottawa grâce aux généreux dons faits à la Fondation de l’Hôpital d’Ottawa.