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Aprotinine et risque accru de décès : une association maintenant établie


le 14 mai 2008

L’aprotinine est associée à une augmentation de 50 % du risque relatif de décès, selon les résultats d’un essai clinique d’envergure réalisé au Canada et visant à comparer trois médicaments couramment utilisés pour prévenir les hémorragies pendant une chirurgie cardiaque. Les résultats de l’essai, publiés en ligne aujourd’hui dans le dernier numéro du New England Journal of Medicine, montrent qu’environ 6 % des patients ayant reçu de l’aprotinine sont décédés dans les 30 jours suivant la chirurgie par comparaison à 4 % chez les patients qui ont reçu de l’acide tranexamique ou de l’acide aminocaproïque.

L’Étude randomisée sur la conservation du sang à l’aide d’antifibrinolytiques (ERCA) est l’une des plus vastes études jamais réalisées sur le sujet. Elle porte sur plus de 2 000 patients à risque élevé qui devaient subir une chirurgie cardiaque. Plus de 100 chirurgiens cardiaques, anesthésiologistes, pharmaciens et coordonnateurs y ont participé dans 19 centres au Canada. Des scientifiques principaux de l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa (l’établissement de recherche de L’Hôpital d’Ottawa affilié à l’Université d’Ottawa) ont dirigé l’étude, qui était financée par des organismes publics.

« Voilà plus d’une décennie que ces trois médicaments sont couramment utilisés pendant les chirurgies cardiaques. Pourtant, il s’agit du premier essai qui les compare d’une façon rigoureuse, selon un protocole rigoureux et, en conséquence, qui donne des résultats probants, déclare le Dr Dean A. Fergusson, cochercheur principal de l’ERCA et scientifique principal. Les résultats montrent en outre la grande valeur et la nécessité des essais cliniques indépendants. »

« Dans l’ensemble, notre étude favorise l’utilisation de l’acide tranexamique ou de l’acide aminocaproïque plutôt que de l’aprotinine pendant une chirurgie cardiaque lorsqu’il s’agit d’un patient à risque élevé, précise le Dr Paul C. Hebert, cochercheur principal de l’ERCA et médecin spécialisé en soins critiques. J’ai traité bon nombre de patients qui subissaient des complications après une chirurgie cardiaque. Je sais donc à quel point ces résultats sont importants pour les patients, leur famille et les professionnels de la santé. »

Le comité directeur de l’ERCA a arrêté prématurément l’étude en octobre 2007 à la suite d’une recommandation d’un conseil de contrôle de la sécurité des données indépendant. Celui-ci avait constaté qu’il y avait une mortalité accrue dans l’un des bras de l’étude à triple insu. Peu après la publication des résultats préliminaires, le fabricant a annoncé qu’il suspendait la commercialisation du médicament jusqu’à ce que l’on analyse les résultats finaux de l’étude.

Les résultats finaux publiés aujourd’hui montrent que même si l’aprotinine semble diminuer certaines conséquences d’un saignement massif, notamment la nécessité de pratiquer une autre chirurgie, les risques surpassent les avantages. L’analyse montre que la mortalité accrue associée à l’aprotinine était aussi associée à des complications cardiaques.

On estime qu’entre 1 et 1,25 million de personnes subissent une chirurgie cardiaque chaque année. L’utilisation d’antifibrinolytiques comme l’aprotinine, l’acide tranexamique ou l’acide aminocaproïque est devenue la norme pour prévenir une hémorragie pendant une chirurgie semblable. Le coût d’une dose d’aprotinine varie entre 1 200 $ et 1 500 $ par comparaison à environs 150 $ pour une dose d’acide tranexamique ou d’acide aminocaproïque. L’ERCA était financée par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario.

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Autres citations

C. David Mazer, MD, anesthésiologiste participant à l’ERCA, affilié au Keenan Research Center du Li Ka Shing Knowledge Institute de l’Hôpital St. Michael’s et à l’Université de Toronto : « C’est de ce genre de données dont a besoin chaque anesthésiologiste cardiaque et chaque chirurgien cardiaque. Les médicaments que l’on croit plus efficaces ne sont pas toujours plus sécuritaires. En tant que médecins, nous devons toujours évaluer les avantages potentiels par rapport aux risques et chercher des médicaments qui offrent un équilibre optimal entre les avantages et les risques afin de donner aux patients la possibilité d’avoir à la fois de meilleurs résultats et une chirurgie cardiaque sécuritaire. »

Stephen Fremes, MD, chirurgien cardiaque participant à l’ERCA, affilié au Sunnybrook Health Sciences Centre et à l’Université de Toronto : « Avant la publication des résultats de l’ERCA, nous considérions, dans le milieu de la chirurgie cardiaque, que chacun des trois médicaments était efficace, mais que l’aprotinine était probablement plus puissante. Dans bien des établissements, les patients à risque élevé recevaient de l’aprotinine et ceux présentant un risque plus faible recevaient de l’acide tranexamique ou de l’acide aminocaproïque. L’ERCA prouve que l’acide tranexamique ou l’acide aminocaproïque sont des choix plus sécuritaires pour les chirurgies cardiaques, même chez les patients à risque élevé. »

Peter Liu, MD, M.Sc., directeur scientifique de l’Institut de la santé circulatoire et respiratoire des IRSC et promoteur de l’Initiative de recherche clinique : « Ces résultats permettront d’améliorer la santé cardiaque des Canadiens, en plus de réduire le risque de complications associé au médicament. C’est seulement grâce à ce type de recherche clinique, qui mobilise des partenaires au gouvernement fédéral, au gouvernement provincial ainsi que dans des établissements universitaires et hospitaliers, que nous pourrons améliorer considérablement la santé des Canadiens et notre système de santé. »

Duncan Stewart, MD, PDG et directeur scientifique de l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, vice-président de la Recherche à L’Hôpital d’Ottawa et professeur de médecine à l’Université d’Ottawa : « L’Institut de recherche en santé d’Ottawa est ravi d’avoir eu l’occasion de soutenir nos scientifiques dans le cadre de cette recherche cruciale que je crois cotisera à une meilleure, plus sûre gestion de saignement pendant la chirurgie majeure du cœur. »

Jacques Bradwejn, MD, doyen de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa : « L’ERCA montre l’importance des études cliniques conçues par des chercheurs universitaires indépendants pour apporter une réponse à des questions importantes, qui peuvent réellement améliorer le traitement des patients. »

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Renseignements sur l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa
L’Institut de recherche en santé d’Ottawa (IRHO) est l’établissement de recherche de L’Hôpital d’Ottawa. Il est également affilié à l’Université d’Ottawa et entretient des liens étroits avec ses facultés de médecine et des sciences de la santé. L’IRHO regroupe plus de 1 300 scientifiques, chercheurs cliniciens, étudiants diplômés, boursiers postdoctoraux et employés de soutien qui se consacrent à la recherche pour améliorer la compréhension, la prévention, le diagnostic et le traitement des maladies. Pour en savoir plus, visitez le site www.irso.ca.

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