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Des chercheurs d’Ottawa découvrent le talon d’Achille d’une forme grave de leucémie infantile


le 2 mars 2016



Des chercheurs de L’Hôpital d’Ottawa et de l’Université d’Ottawa ont découvert le talon d’Achille d’une des formes les plus agressives de leucémie qui touche à la fois les enfants et les adultes. Ils ont aussi ciblé un nouveau traitement potentiel qui exploite cette faiblesse fatale.

Leur étude, publiée le 1er mars 2016 dans la revue Genes & Development, porte sur la leucémie aiguë lymphoblastique qui met en cause le gène TAL-1. L’auteure principale de l’étude, Marjorie Brand, Ph.D., et son équipe ont découvert qu’un composé appelé GSK-J4 peut tuer cette forme de cancer.

En transplantant des cellules cancéreuses d’humains chez des souris en santé, les auteurs ont montré que le composé peut tuer des cellules leucémiques rapidement, efficacement et sans causer d’effets secondaires à court terme. Le composé GSK-J4 a été mis au point par des compagnies pharmaceutiques à des fins de recherche et n’a jamais été utilisé pour combattre le cancer.

« La découverte est très prometteuse, car c’est la première fois qu’on trouve un traitement potentiel personnalisé contre cette maladie dévastatrice », explique Marjorie Brand, scientifique principale à L’Hôpital d’Ottawa et professeure à l’Université d’Ottawa. « Contrairement aux traitements actuels, le nôtre cible le gène responsable sans nuire au reste du corps. »

La leucémie aiguë lymphoblastique (LAL) est le type de cancer le plus courant chez les enfants. Elle apparaît dans les globules blancs, qui aident normalement le corps à combattre les infections. Le type de cancer sous la loupe de la scientifique est appelé T-LAL parce qu’il touche une catégorie de globules blancs appelés lymphocytes T. T-LAL est à l’origine de 15 % des cas de LAL. L’étude porte sur une forme commune de T-LAL appelée TAL-1.

À l’heure actuelle, il existe une seule approche du traitement de toutes les formes de T-LAL : une chimiothérapie drastique causant des effets secondaires, incluant le risque d’avoir un cancer secondaire par la suite et un retard de croissance chez l’enfant. S’il y a récidive du cancer après ce traitement, le patient décède généralement en peu de temps.

« Avec les traitements actuels, le taux de guérison est de 90 % pour certaines formes de T-LAL », précise Aissa Benyoucef, auteur qui a dirigé l’étude et boursier postdoctoral à L’Hôpital d’Ottawa et à l’Université d’Ottawa. « Le taux de guérison pour la forme TAL-1 que nous étudions est seulement de 50 %. Elle est très agressive. »

L’équipe de scientifique a décidé que la meilleure façon de trouver un traitement plus efficace pour la forme TAL-1 était de comprendre son fonctionnement moléculaire.


L’équipe a étudié le gène TAL-1, qui peut dans certains cas transformer en cellules cancéreuses des cellules appelées à devenir des lymphocytes T. Le gène TAL-1 y parvient en activant des gènes qui amènent les globules blancs à croître de façon incontrôlable. Les cellules cancéreuses finissent par se propager dans le sang et tout le corps, causant la leucémie.

L’équipe a découvert un point faible chez le gène TAL-1 : il a besoin d’une complice, une enzyme appelée UTX, pour déclencher la production de cellules cancéreuses. Lorsque l’équipe a utilisé le composé GSK-J4 pour inactiver l’enzyme UTX, elle a complètement arrêté la croissance des cellules cancéreuses produites par le gène TAL-1. Le traitement a fonctionné seulement pour cette forme de leucémie, pas pour les autres types de T-LAL.

L’équipe a injecté des cellules leucémiques humaines de type TAL-1 à des modèles murins. Après les avoir traités à l’aide du composé GSK-J4 pendant trois semaines, elle a découvert que le nombre de cellules cancéreuses dans leur moelle osseuse avait diminué de 80 %. De plus, le composé n’a pas endommagé les cellules saines ni causé d’effets secondaires à court terme sur d’autres organes du corps.

« Notre étude visait à valider le principe, mais ces résultats prometteurs pourraient un jour mener à un traitement similaire ciblé pour l’humain », affirme une autre auteure de l’étude, Carmen Palii, Ph.D., associée de recherche au sein du laboratoire de Marjorie Brand.

Entretemps, l’équipe réalise des études précliniques chez des modèles murins pour évaluer l’effet de doses accrues et les effets secondaires à long terme du GSK-J4.

« Il faut apprendre comment une maladie fonctionne au niveau moléculaire avant de pouvoir mettre au point un médicament, ajoute Marjorie Brand. Il faut faire des études en laboratoire pour trouver le bon traitement et prouver qu’il fonctionne. »

Référence complète : Benyoucef, Aissa, Carmen G. Palii, Chaochen Wang, Christopher J. Porter, Alphonse Chu, Fengtao Dai, Véronique Tremblay, Patricia Rakopoulos, Kulwant Singh, Suming Huang, Francoise Pflumio, Josée Hébert, Jean-Francois Couture, Theodore J. Perkins, Kai Ge, F. Jeffrey Dilworth et Marjorie Brand. « UTX Inhibition as Selective Epigenetic Therapy against TAL1-driven T Cell Acute Lymphoblastic Leukemia », Genes and Development, le 1er mars 2016.


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