Nouvelles

Prolonger la RCR ne présente aucun avantage selon le plus vaste essai clinique au monde sur les arrêts cardiaques


le 31 août 2011

Un essai mené auprès d’environ 10 000 patients ayant subi un arrêt cardiaque dans 10 régions en Amérique du Nord montre qu’il n’est pas avantageux d’indiquer aux paramédicaux et aux pompiers de prolonger la réanimation cardiorespiratoire (RCR) d’une à trois minutes. L’essai, dirigé par le Dr Ian Stiell, qui est rattaché à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa (IRHO), à l’Université d’Ottawa et au Consortium sur les résultats de la réanimation, met fin à une controverse mondiale sur les soins à prodiguer aux victimes d’arrêt cardiaque. Il s’agit du plus vaste essai randomisé au monde en matière d’arrêt cardiaque. Les résultats sont publiés dans le New England Journal of Medicine.

Chaque année au Canada et aux États-Unis, plus de 350 000 personnes subissent un arrêt cardiaque soudain. Moins de 10 % d’entre elles y survivent. Des soins de RCR prompts peuvent accroître la circulation du sang jusqu’au cerveau et garder une personne en vie un court moment. Mais chez les personnes qui présentent un certain rythme cardiaque, il faut avoir recours à un défibrillateur pour donner des chocs électriques au cœur et le réanimer.

Habituellement, les paramédicaux et les pompiers analysent le rythme cardiaque du patient dès que possible et pratiquent la RCR de courte durée tout en préparant un défibrillateur. Plusieurs études récentes donnaient toutefois à penser qu’il serait mieux de prolonger la RCR (pendant jusqu’à trois minutes) avant d’analyser le rythme cardiaque. Comme les lignes directrices cliniques ne précisent pas clairement le protocole à privilégier, les pratiques varient d’une région à l’autre.

Dans le cadre de cet essai, des paramédicaux et des pompiers Canadiens et Américains ont été répartis de façon aléatoire dans deux groupes. On a demandé à un groupe de faire la RCR pendant 30 à 60 secondes et à l’autre, de la faire pendant trois minutes. On a inversé les protocoles au mi-point de l’essai. Une première analyse des données recueillies auprès des 9 933 patients traités n’a révélé aucune différence entre les résultats des deux protocoles. 5,9 % de tous les patients ont survécu et sont sortis de l’hôpital dans un état de santé satisfaisant.

Mais une analyse plus approfondie révèle qu’il faut tenir compte de la durée réelle de la RCR, c’est-à-dire d’y ajouter la période de temps pendant laquelle une personne autre qu’un secouriste a donné des soins de RCR au patient en attendant l’arrivée des paramédics ou des pompiers, qui prennent ensuite la relève. On constate alors que le taux de survie des patients dont le rythme cardiaque est propice à la défibrillation diminue plus la RCR initiale est prolongée par un secouriste. Ce sous-groupe de patients représente environ 10 % des sujets de l’essai. Aucun des autres sous-groupes analysés n’a présenté des résultats de différence pertinente.

« Notre essai montre définitivement qu’il n’y a aucun avantage à prolonger la RCR, indique le Dr Ian Stiell, scientifique principal à l’IRHO, titulaire de la Chaire de recherche en urgentologie à l’Université d’Ottawa et urgentologue à L’Hôpital d’Ottawa. Les données semblent aussi montrer que les personnes ayant reçu des soins de RCR avant l’arrivée des secouristes pourraient mieux s’en tirer si les secouristes donnent une RCR de plus courte durée. Même si la signification des résultats de l’essai suscite encore certains débats, j’estime qu’il est mieux de privilégier la sécurité et de continuer de pratiquer la RCR de courte durée. »

L’étude a été réalisée avec la collaboration du Consortium sur les résultats de la réanimation (Resuscitation Outcomes Consortium), un important réseau de recherche canadien et américain qui œuvre pour améliorer le taux de survie des victimes d’arrêt cardiaque et de traumatisme grave. L’étude est subventionnée au Canada par les Instituts de recherche en santé du Canada, Recherche et Développement pour la défense et la Fondation des maladies du cœur. Aux États-Unis, elle bénéficie du soutien financier du National Heart, Lung and Blood Institute, du National Institute of Neurological Disorders and Stroke, du Department of Defense et de l’American Heart Association.

« Les Instituts de recherche en santé du Canada sont heureux d’appuyer cet effort de collaboration entre le Canada et les États-Unis, a déclaré le Dr Jean Rouleau, directeur scientifique de l’Institut de la santé circulatoire et respiratoire. En clarifiant la marche à suivre pour les paramédicaux et les pompiers en cas d’arrêt cardiaque, cette étude constitue un excellent exemple de l’intégration directe de la recherche en santé dans la pratique. »

« Les études du Consortium sur les résultats de la réanimation sont essentiels pour préciser la science de la réanimation et aideront à sauver encore plus de vies, affirme Manuel Arango, directeur des politiques en matière de santé à la Fondation des maladies du cœur. Les connaissances acquises à la suite de cette étude aident à faire progresser notre compréhension des techniques optimales de réanimation et contribueront à formuler les prochaines lignes directrices de soins d’urgence cardiovasculaire. »

Plus de 60 % des sujets de l’essai sont des patients de membres canadiens du réseau du Consortium, dont l’IRHO, l’Université d’Ottawa, l’Université de la Colombie-Britannique, l’Hôpital St. Michael et l’Université de Toronto. L’IRHO et l’Université d’Ottawa y ont participé de façon particulièrement importante avec 7 services de médecine d’urgence, 13 services d’incendie et 13 villes en Ontario.

« J’aimerais remercier les milliers de paramédicaux et de pompiers qui ont contribué au succès de l’étude », ajoute le Dr Stiell.

« Le Service paramédic d’Ottawa est fier d’avoir participé à un important projet de recherche, déclare Anthony Di Monte, chef du Service. Cela nous permet améliorer les connaissances en paramédecine et de continuellement offrir des soins de grande qualité aux patients et à la collectivité que nous servons. »

« Les paramédicaux d’Ottawa ont joué un grand rôle dans cette recherche, encore une fois en guidant le monde entier à offrir les meilleurs soins possible, déclare le Dr Justin Maloney, directeur médical du Programme régional des paramédics de l'Est de l'Ontario et urgentologue à L’Hôpital d’Ottawa. Ils se sont ainsi taillé une formidable réputation à l’échelle internationale. »

Les résultats d’un autre essai mené par le Consortium portant sur un nouveau dispositif pour améliorer la circulation sanguine pendant la RCR seront publiés dans le numéro du 1er septembre 2011 du New England Journal of Medicine.

Au sujet de l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa
L’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa (IRHO) est affilié à l’Université d’Ottawa et entretient des liens étroits avec ses facultés de médecine et des sciences de la santé. L’IRHO regroupe plus de 1 500 scientifiques, chercheurs cliniciens, étudiants diplômés, stagiaires postdoctoraux et employés de soutien qui se consacrent à la recherche pour améliorer la compréhension, la prévention, le diagnostic et le traitement des maladies. www.irho.ca

Renseignements
Jennifer Paterson
Directrice, Communications et Relations publiques
Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa
613-798-5555 poste 73325
613-614-5253 (cellulaire)
jpaterson@ohri.ca